Malgré l’arrivée des premières doses d’AstraZeneca (Covishield) dans le pays, la question autour de la vaccination à Madagascar continue d’alimenter de nombreuses interrogations chez les citoyens. Le Professeur Ange Andrianarisoa, vice – président de l’Académie Nationale de Médecine de Madagascar (ANAMEM) a accepté de répondre à nos questions pour apporter quelques éclaircissements. Les critères dans le choix des 4 vaccins (Pfizer, Covishield alias AstraZeneca, Johnson & Johnson, Sinopharm), la question autour de l’immunité collective seront parmi les principaux sujets qu’il a abordés. Interview.
Comment voyez-vous l’évolution de la Covid-19 à Madagascar ?
L’épidémie a beaucoup évolué surtout en cette période de froid. Cela explique d’ailleurs la hausse des cas mais aujourd’hui apparemment les chiffres officiels montrent déjà une certaine baisse.
Le protocole de traitement utilisé jusqu’ici vous satisfait ?
Il est difficile de se prononcer là-dessus car les médicaments destinés à traiter la Covid-19 à Madagascar varient selon le cas, surtout si le patient se trouve dans une forme grave ou est sujet à une maladie chronique. D’où l’importance de se protéger.
En quoi consistait exactement le rôle de l’Académie de médecine dans le choix des 4 vaccins qui ont été validés par l’Etat malagasy ?
Le Président de la République nous a sollicités afin d’obtenir notre avis et expertise sur les vaccins de la Covid-19. Après de nombreuses documentations sur les vaccins et leurs utilisations dans le monde, nous lui avons préconisé que Madagascar peut introduire les vaccins pour protéger les citoyens.
Pouvez – vous expliquer le choix des 4 vaccins ?
Nous nous sommes basés sur trois critères : d’abord, la possibilité de stockage des vaccins, la seconde est leur efficacité dans le traitement de la Covid-19 et enfin, le dernier critère, leurs effets sur les variants.
Pourquoi avoir choisi Covishield (AstraZeneca) malgré les effets secondaires annoncés et les nombreuses polémiques autour de ce vaccin ?
En fait, l’AstraZeneca figure déjà dans la liste des vaccins disponibles au sein de l’initiative COVAX au même titre que Johnson & Johnson. Donc, si nous n’avions pas choisi ce vaccin, Madagascar n’aurait pas encore pu bénéficier de vaccins dans l’immédiat. Concernant les effets secondaires, comme je l’ai déjà annoncé, nous nous sommes déjà documenté avant de prendre la décision. Nous avions pu constater que les effets secondaires ne touchaient qu’une infime partie des vaccinés dans le monde.
Certains scientifiques étrangers avancent que la vaccination favorise l’apparition des variants. Comment percevez – vous les nombreuses appréhensions par rapport aux vaccins ?
Je dirais que comme chaque produit médical, l’effet des vaccins diffère selon les conditions physiques de chaque personne. Mais je ne pense pas que ce soit les vaccins qui favorisent les variants. La Covid-19 est comme la grippe, c’est un virus qui mute. C’est ce phénomène de mutation qui crée les variants. En tout cas, chacun est libre de choisir entre se faire vacciner ou pas.
Peut-on atteindre l’immunité collective à Madagascar ?
Statistiquement pas encore. En effet, l’immunité collective est seulement possible si 70 à 80% de la population est vaccinée. Cela signifie que les personnes vaccinées reçoivent des anticorps qui empêchent ainsi une trop forte circulation de l’épidémie. En plus, à ma connaissance, le plan national de déploiement de la vaccination établie par les autorités qui se décline en plusieurs phases s’oriente vers une vaccination ciblée.
A votre avis, pourquoi le choix de cette vaccination ciblée ?
Lors de nos échanges avec le Président de la République et le ministre de la Santé, ce dernier nous (les membres de l’Académie de Médecine) a exposé que dans un premier temps, des catégories de citoyens (3% de la population) seront priorisés à savoir les Forces de l’ordre, le personnel soignant, les personnes âgées et les personnes vulnérables. En principe, la vaccination limite la propagation du virus. Je suppose donc que ce choix est fait dans cet objectif là en misant sur la protection des plus fragiles.
Personnellement, allez – vous vous faire vacciner ?
Oui. Je me suis déjà inscrit auprès du Fokontany et, moi et mon épouse, envisageons de nous faire vacciner très bientôt.
Enfin, qu’en est – il alors des remèdes traditionnels ?
On ne peut pas interdire les gens dans l’usage des remèdes traditionnels. Si cela leur fait du bien, ils peuvent en recourir.
Propos recueillis par Sandra R.